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USAGES ET DANGERS DU CLONAGE THERAPEUTIQUE

 

I.                  Les usages

 


           Outre ses nombreuses limites, le clonage thérapeutique permettrait de nombreux usages dans la médecine et offrirait donc de nouvelles perspectives de traitements contre des maladies encore incurables.

           On sait grâce à des expériences qui ont été effectuées chez l’animal qu’une cellule prélevée peut redonner un embryon complet. Ces cellules sont définies comme cellules souches embryonnaires et sont caractérisées par leur totipotence ou pluripotence. Cela signifie qu’elles peuvent former tous les types de cellules nécessaires à la médecine. Le principal avantage de ces cellules par rapport aux greffes d’organes actuelles est que le rejet immunitaire est impossible étant donné que les cellules greffées proviennent d’un embryon génétiquement identique au malade. Les problèmes de tolérance immunologique pour le patient qui subirait le traitement seraient donc évités. Par ailleurs, cette technique pose de nombreux problèmes éthiques, d’où l’expansion depuis plusieurs années de la recherche sur les cellules IPS qui suppriment, en plus des problèmes d'immunocompatibilité, les questions éthiques.

 

1.      La situation actuelle

           Un des principaux objectifs du clonage thérapeutique et de pouvoir un jour reproduire des organes entiers. En effet, le domaine du don d’organes connait une grave pénurie depuis plusieurs années : le nombre de patients inscrits sur les listes d’attentes ne cesse d’augmenter alors que le nombre de greffes pratiquées reste stable. Ainsi en 2010 seulement 30% des malades inscrits sur les listes d’attentes furent greffés. En plus du manque de don qui met à mal les greffes d’organes et de la difficulté qui peut découler de trouver un donneur compatible au receveur, le rejet de greffon constitue également un inconvénient à cette technique. Si un an après la transplantation, 90% des greffons fonctionnent, ce pourcentage diminue à 60 % après 10 ans et enfin, après 12 ans de greffe, seulement la moitié des patients ont un greffon fonctionnel.

 

liste d'attente évolution 2004-2010

           Un autre domaine médical dans lequel le clonage thérapeutique pourrait s’imposer est le don de sang. En effet, le clonage thérapeutique, en produisant des globules rouges en grande quantité, pourrait pallier au problème de pénurie de sang.

           Dans le cadre de notre sondage, nous avons constaté que 72% des personnes interrogées seraient prêtes à faire des dons de leurs cellules.
Ce résultat très encourageant montre une réceptivité de la population et va en faveur du nouveau principe de greffes que constitue le clonage thérapeutique.

 

2. Les perspectives

Le clonage thérapeutique nourrit particulièrement d’espoirs dans des maladies considérées aujourd’hui comme incurables.


Voici quelques exemples de son application à la thérapie.


Maladies du système nerveux : dans le cas de ces maladies, le clonage thérapeutique permettrait de produire des neurones produisant des neurotransmetteurs défectueux et de les transplanter dans le cerveau ou la moelle épinière. Ainsi, on pourrait combattre certaines maladies comme la maladie d'Alzheimer, de Parkinson, de Huntington, la sclérose en plaques ou d'autres maladies neurodégénératives. C’est dans ce type de traitement que le clonage thérapeutique fait naître le plus d’espérance. En effet, en 2008 des souris artificiellement rendues atteintes de la maladie de Parkinson ont été traitées puis soignées en partie par une équipe l'équipe du centre de traitement et de recherche sur le cancer au Japon. Après l’obtention de 187 lignées de cellules souches, ils ont su en mener la différenciation pour ainsi en faire des neurones dopaminergiques. Ces neurones ont ensuite été transférés dans le cerveau des souris malades. Les résultats montrèrent bien l’intérêt de la dimension « sur mesure » du clonage thérapeutique : on a noté une amélioration des fonctions chez les souris ayant reçu des neurones issus de leur propre clone thérapeutique. Par ailleurs, chez les souris à qui on a greffé des neurones étrangers, aucun effet n’a pu être observé. Cette expérience qui a été réalisée sur des souris qui n’étaient pas réellement atteintes maladie de Parkinson comme on peut l’observer chez l’homme ne peut être aujourd’hui envisagée comme une méthode thérapeutique applicable sur l'homme, mais elle montre au moins la possibilité de ces techniques de clonage.


Infarctus du myocarde : dans le cas d’un infarctus, les artères se bouchent et le sang ne peut plus circuler. Les cellules du cœur ne sont alors plus oxygénées et peuvent être détruites, on pourrait ainsi les remplacer par d’autres cellules musculaires cardiaques obtenues par clonage thérapeutique. En France, dans les années 2000, un cœur a été reconstruit grâce à une greffe de cellules souches musculaires, une première dans l’histoire de la médecine.
Maladies des os et du cartilage : de nouvelles cellules osseuses obtenues par clonage thérapeutique pourraient être un moyen de reconstruire des os manquants ou détériorés.


Cancers et maladies immunodéficitaires : pour lutter contre les déficiences du système immunitaire dans le cas de maladies comme le SIDA, on pourrait produire des cellules hématopoïétiques et remplacer les déficientes. Cela pourrait également être une alternative dans le cas de traitement du cancer, ce qui permettrait une utilisation plus intensive des médicaments utilisés dans le traitement de cette maladie.


Diabète : si le clonage thérapeutique était fonctionnel, on pourrait également implanter dans le pancréas des cellules produisant de l'insuline.


Des recherches sont également en cours dans d’autres domaines. Tout d’abord, des chercheurs arrivent à produire de l’épiderme grâce à des cellules appelées kératinocytes. Cette innovation qui devrait aboutir dans les années à venir proposerait ainsi à des malades présentant des ulcères cutanées des pansements provisoires, notamment dans le cas de personnes atteintes de drépanocytose ou de diabète. La création de mélanocytes peut également être une alternative pour des personnes souffrant de vitiligo ou à l’inverse d’hyperpigmentation. A plus long terme, ces découvertes pourraient être à l’origine de greffes de peau permanentes. Des recherches sur la rétine sont également en cours. Elles consistent à reproduire des cellules photoréceptrices permettant de recevoir la lumière et de transmettre ces informations lumineuses aux cellules de la rétine pour envoyer l’image au cerveau. Ces cellules sont produites dans le but d’être transplantées à des personnes et de combattre certaines maladies monogéniques les rendant aveugles.

Interview de Monsieur Sébastien Duprat (pour démarrer la vidéo cliquer sur l'image)

Le clonage thérapeutique présente donc de nombreuses applications, et la médecine régénérative ferait une avancée conséquente s'il était opérationnel. Cependant, en plus des limites d'ordre techniques, économiques, législatives et éthiques auxquelles il est soumis, il présente de nombreux risques.

 

 

II-              Les dangers

 

    Aujourd’hui, aucun clonage n’a encore été réalisé sur l’homme. Ainsi, pour envisager les risques qui pourraient découler de son utilisation, nous nous baserons sur les essais réalisés sur les animaux, pouvant rendre compte des difficultés qui pourraient survenir chez l’homme, et sur les connaissances scientifiques actuelles nous permettant d’anticiper ces risques.

1.      Un danger pour l’humanité

    Le clonage représente tout d’abord un risque pour l’humanité et son évolution dans son ensemble, étant une reproduction conforme du génome*, il ne permettrait pas la diversité et la recombinaison du patrimoine génétique et remettrait en cause son caractère aléatoire. Il aurait tendance à diminuer la variabilité génétique entre les individus et, d’une certaine façon, à les "uniformiser".


Or, selon la théorie de l'évolution et la sélection naturelle, la diversité génétique est le moyen de l'adaptation des espèces aux milieux et aux changements environnementaux au fil des générations, constituant ainsi la donnée fondamentale sur laquelle repose la vie. Appliqué à outrance, le clonage serait donc contraire à l’évolution biologique naturelle.

2. Vieillissement prématuré et cancer

           En 1996, après la création de 277 cellules-œufs et la naissance de 30 embryons, les chercheurs écossais Keith Campbell et Ian Wilmut créent Dolly, le premier mammifère cloné de l'histoire. Obtenue à partir de cellules de glande mammaire – clonage effectué par transfert de noyau de cellule somatique – d'une brebis nommée Belinda âgée de 6 ans, Dolly subit un vieillissement prématuré. En effet, les cellules prises de Belinda disposaient de télomères raccourcis à l’extrémité de leurs chromosomes du fait de la longueur des télomères diminuant après chaque division cellulaire. Les télomères, sont des indicateurs du vieillissement. Identiques dans tous les chromosomes des cellules, ces derniers contribuent à l’intégrité du patrimoine génétique. Au cours de chaque division cellulaire, la taille des télomères diminue car leur extrémité n’est pas répliquée. Au fil des divisions successives, les télomères sont ainsi victimes d’un raccourcissement de plus en plus important. Lorsque ce dernier atteint un point critique, la cellule entre en senescence, puis meurt à plus ou moins long terme. Ce phénomène, qui associe la capacité de prolifération des cellules à la taille des télomères, participe au vieillissement des organismes. Il est en faveur de l’existence d’une sorte d’horloge interne qui enregistre le nombre effectif de divisions cellulaires. Dolly avait alors un patrimoine génétique âgé de 6 ans dès sa naissance. Elle fut ainsi soumise à de nombreuses complications : arthrite prématurée, maladie pulmonaire et de ce fait, fut euthanasiée en 2003 alors âgée de 6 ans, la durée de vie moyenne d’une brebis étant d’environ 10 ans.


Par ailleurs, d’autres types de cellules privilégiés aujourd’hui pour l’application du clonage thérapeutique échappent à l’érosion des télomères. Cependant, ces cellules ne sont pas pour autant totalement exemptes de risque.


Les scientifiques ont constaté que 20% des cellules réimplantées devenaient un cancer. Même si, de nos jours, ils ont les moyens de détruire le cancer dès sa formation, le clonage aurait néanmoins été inutile puisque les cellules auraient été détruites avec le cancer. L’apparition de cancers s’explique par les fortes similitudes entre les cellules souches, qui n’ont pas été « éduquées » à cesser de se reproduire, et les cellules cancéreuses. Cette ressemblance fait craindre que les cellules souches puissent acquérir le même développement anarchique que les cellules cancéreuses, surtout si ces cellules souches sont directement transplantées chez le patient, en raison même de leur extraordinaire potentiel de différenciation. L'organisme receveur ne saurait pas contrôler leur développement, elles formeraient des tératomes et se transformeraient alors en cellules tumorales, qui risqueraient de proliférer, de migrer de leur lieu de production formant des métastases et entrainant ainsi chez l’individu l’apparition de cancers. En effet, les cellules souches embryonnaires extraites puis injectées sont difficilement contrôlables.

 

3.   Non maîtrise du processus de différenciation

            Un danger de plus que représenterait l'application clinique des nouvelles thérapies à base de cellules souches humaines est notamment la formation de tissus inadéquats, le risque étant que les cellules ne se multiplient pas seulement pour former un tissu de substitution ou d'appoint, mais qu'il se forme également des tissus résultant d'une mauvaise différenciation. En effet, parmi les cellules différenciées en milieu de culture, il peut y avoir des « erreurs d’aiguillage » : si des cellules programmées pour se différencier en cellules neuronales devenaient des cellules cardiaques, que se passerait-il alors si on les injectait dans le cerveau ?

Dans de telles circonstances et sous l’influence du caractère encore trop aléatoire de cette technique, il paraît alors inconcevable de prendre le risque de l’appliquer chez les humains. De nombreuses recherches visant à pallier ces difficultés sont ainsi en cours, elles sont cependant soumises à des limites législatives et éthiques que nous allons aborder par la suite.